Mode érotique: Lingerie féminine

L'Antiquité ne connaissait pas de sous-vêtements variés et raffinés; le climat n'en avait tout simplement pas besoin. Cependant, l'un des principes fondamentaux de la mode érotique – pars pro toto (la partie plutôt que le tout) – était bien connu. Apulée, dans ses « Métamorphoses », décrit « une partie féminine rasée de près », légèrement camouflée « plus pour l'ombrager habilement que pour la couvrir pudiquement ». L'historien Polybe décrit un festin chez le roi Antigone, où les invités furent enchantés par les danseuses: « La danse devint de plus en plus voluptueuse et enflammée. Elles ôtèrent leurs couvertures de la tête et des épaules, et se retrouvèrent complètement nues, si l'on excepte le petit pantalon qui couvre à peine la partie médiane du corps. »

Les Chinois, qui avaient acquis une grande maîtrise de l'art du « palais du printemps », considéraient également la nudité partielle comme plus érotique que la nudité d'un bébé. Des images des XIIIe et XIVe siècles représentent des amants en blouse courte, parfois les deux, parfois seule la femme porte une blouse. Des images mandchoues d'une époque plus tardive montrent des femmes vêtues d'étranges « robes ventrales » ornées de fines cravates. Une caractéristique essentielle et exclusive de l'éros chinois est le fait de couvrir les pieds de bandages spéciaux. Le jeu le plus intime et le plus excitant consistait à défaire les bandages des jambes, ce qui signifiait une nudité totale.

Pour déshabiller complètement une prostituée japonaise, il fallait retirer le traditionnel « drap » de soie recouvrant sa « zone intime ». La soie était utilisée car cette matière retenait le mieux l'odeur « féminine », que les Japonais (et pas seulement eux) considéraient comme excitante.

La Renaissance n'a pas enrichi la mode européenne de la « lingerie », puisque la liberté morale sans entrave permettait la nudité complète au lit (la coutume de dormir sans chemise était répandue), pendant le bain, dans les bains, etc. Au mieux, dans de telles situations, les hommes portaient un petit tablier et les femmes - seulement des bracelets, des colliers et des bijoux dans les cheveux.

Aux XVIIe et XVIIIe siècles, le jupon fit son apparition, et il était d'autant plus intéressant pour les hommes de le regarder, car les dames ne portaient pas de pantalon. Chaussures, bas et jarretières remplissaient la fonction excitante de sous-vêtements. Tout un « art de montrer ses jambes » – le retrousser – apparut. Les jarretières, portées au-dessus des genoux, étaient ornées de devises, dont la lecture, ou plutôt la possibilité de les lire, devint un élément important du jeu érotique.

Au XIXe siècle, la lingerie connut une véritable révolution. Les sous-vêtements servaient de moins en moins à des fins hygiéniques et de plus en plus à des fins d'excitation érotique. Les pantalons, qui remplacèrent le jupon, étaient très petits et n'arrivaient jamais en dessous des genoux. À la même époque, ils étaient ornés de toutes sortes de volants, de nœuds, etc., en quête d'un nouvel attrait érotique. On inventa toutes sortes de combinaisons de pantalons avec une chemise ou une jupe. Les bas restèrent un moyen important d'influencer l'homme. Le dictionnaire « Éros » (1820) affirme qu'« un bas blanc fin, qui, grâce à son élasticité, épouse si étroitement les mollets et les jambes que les formes généreuses de ces parties du corps paraissent tendrement arrondies, est capable de… véritablement enchanter. Des bas sombres et pendants produisent l'impression inverse. »

La mode évolue, comme il se doit: le noir est désormais considéré comme la couleur la plus adaptée à la lingerie érotique, aux côtés du blanc, dominant au XIXe siècle. Pour les hommes, les stimulants sont des vêtements qui épousent la poitrine et les fesses. Les femmes réagissent moins à ces irritants spécifiques; pour elles, le principal stimulant est l'homme lui-même. Cependant, les parties génitales, clairement soulignées par des culottes moulantes, peuvent agir comme stimulant.

L'excitation est un mécanisme complexe et individuel. Certains sont excités par des vêtements moulants à la structure spéciale qui mettent en valeur le pubis proéminent et les poils qui le recouvrent. D'autres sont excités par la menace symbolisée par le noir, le cuir et les boucles. L'industrie moderne est capable de satisfaire toutes les demandes, des plus sophistiquées aux plus insolites, dans ce domaine. Par exemple, le catalogue de l'entreprise américaine Doc Johnson, le plus grand fabricant de sextoys et d'accessoires, propose des dizaines de modèles de lingerie érotique. Leurs noms sont révélateurs des styles: « Fifi, la française » (un ensemble culotte et chemise translucides ornés de cœurs, de dentelle, etc.); « tigresse », « dévoilée » (qui peut se traduire par « ouvrable, accessible à la pénétration ») (collants transparents avec une fente bordée de dentelle entre les jambes); « after dark » (à la tombée de la nuit) (culotte noire avec un joli sémaphore blanc au niveau du pubis); « nymphe sombre » « gibier sauvage »; « ours en peluche » etc.

Sous-vêtements érotiques pour hommes: principalement des slips (à l’exception d’une sorte de combinaison de lutte en cuir noir). Ils sont généralement confectionnés dans un tissu effet mouillé, qui souligne les formes, ou en résille (presque dentelle), qui les révèle directement. Les noms des modèles sont résolument brutaux: « jungle joy » (avec une fermeture éclair sur le devant); « security guard »; « player »; « spearman »; « mr. Stud » (le nom anglais « mr. Stud » est un jeu de mots signifiant également rivets: toute la surface du slip en est recouverte); encore « sémaphore » – cette fois « after six », c’est-à-dire que l’action ne commence pas à la tombée de la nuit, mais immédiatement après six heures; etc. Comme tous les produits des grandes entreprises du secteur, les sous-vêtements sont soumis à un contrôle hygiénique et sexologique rigoureux.

Notre excursion dans le domaine de la lingerie érotique est forcément brève, l'histoire de la mode et de l'érotisme ayant conservé une quantité considérable de matières (et même de motifs). J'ajouterai simplement que, de manière générale, le débat entre beauté et utilité semble dénué de sens, car la beauté inutile n'existe pas.